Depuis sa création en janvier 2019, L’Imprévue, avec son exergue de Jules Verne, est passeuse de livres. Sur l’océan infini de tout ce qu’on ne sait pas les livres sont autant d’îles inconnues que nous abordons avec ceux qui ont la bienveillance de nous lire.
Les humains sont les seuls animaux à raconter des histoires, à chasser l’obscurité avec des contes, à apprendre à cohabiter, grâce aux récits, avec le chaos, à parcourir de longues distances pour porter nos histoires aux étrangers.
Et quand nous partageons les mêmes récits nous ne sommes plus étrangers.[1]
– Quel gros livre, monsieur Cyrus, on ferait avec tout ce qu’on sait !
– Et quel plus gros livre avec tout ce qu’on ne sait pas, répondit Cyrus Smith…
Jules Verne, L’île mystérieuse
Socrate craignait qu’avec la parole écrite, les humains abandonnent aux livres le savoir et la pensée, oubliant leur réflexion personnelle et leur connaissance vécue.
Il se méfiait de l’oubli que l’écrit allait produire dans les âmes, leur faisant négliger la mémoire et la recherche intérieure des souvenirs.
Quand ils auront beaucoup lu sans apprendre, ils se croiront très savants et ne seront le plus souvent que des ignorants de commerce incommode, parce qu’ils se croiront savants sans l’être…[2]
C’est d’abord en soi qu’il faut aller chercher le savoir et la vérité, non chez les faiseurs de discours ou les jongleurs de phrases.
[1] Irene Vallejo L’Infini dans un roseau, Les Belles lettres 2021
[2] Platon Phèdre, 277b-277d Garnier Flammarion